L'analyse conversationnelle pour la simulation clinique pleine échelle : à partir des formulations en direct et a posteriori, potentiel des"secondes analyses".
Lucien Tisserand  1@  
1 : Université Sorbonne Nouvelle - Paris 3
Clesthia, Langage, systèmes, discours EA 7345

Cette communication a pour objet les pratiques de formation par simulation clinique pleine échelle : un mannequin robotisé joue le rôle du patient dans un environnement reproduisant une salle de soin réelle à l'intérieur de laquelle les apprenants accomplissent un "scénario". Le développement de la simulation répond à un impératif d'enseignement de compétences dites "non techniques", soit des compétences organisationnelles (Cooper & Taqueti, 2004). Le "facteur humain", désignant "l'interrelation des hommes avec leur outils et environnements de travail" (Kohn, Corrigan & Donaldson, 2000), est ainsi pointé comme majoritairement responsable des événements indésirables graves liés aux soins.
Le "scénario" est observé en direct par les formateurs à travers une vitre san tain dans une cabine de pilotage ainsi que par les autres apprenants par retransmission vidéo. Au cours de cette observation, les formateurs produisent une analyse de l'activité par le biais de pratiques de pointages et de séquences évaluatives. Tous les acteurs de la formation ayant assisté au scénario, celui-ci donne immédiatement lieu à un débriefing. Ces événements de parole constituent alors un deuxième locus pour la production d'analyses a posteriori. Ces analyses par les membres eux-mêmes sont autant de types de formulations par lesquelles l'activité formulée ne peut pas être décrite par l'examen du contenu de cette formulation (Garfinkel & Sacks, 1970).

Nous montrerons l'intérêt d'une analyse séquentielle suscitée par la "première" analyse des membres à travers la présentation de deux cas. Dans chaque cas, nous analysons les circonstances de la formulation afin de comprendre quelle activité du scénario suscite une "seconde analyse" par le chercheur.
Dans le premier cas, nous partons d'une évaluation faite par les formateurs en direct pendant l'observation. En analysant le scénario, nous montrons que nous pouvons documenter les conditions d'émergence d'un comportement évalué négativement en aval.
Dans le second cas, nous partons du débriefing où l'accomplissement d'une tâche est problématisé pour être finalement évacué car ne remplissant pas l'agenda d'analyse "non technique" du débriefing. Notre seconde analyse suscitée du scénario montre que la compréhension des contingences organisationnelles de ce problème "technique" documente pourtant des réflexions de membre sur des problèmes "non techniques" à la fois nouveaux mais aussi posés ailleurs dans le débriefing.

Enfin, pour les deux cas, nous montrons plus généralement que l'analyse conversationnelle (Gülich & Mondada, 2001) permet de réunir les problèmes séparés en "technique" vs "non technique" par les membres, facilitant ainsi l'identification de problèmes "situés" dans des routines de travail reconnaissables. Les épisodes sujets à une "seconde analyse" sont ainsi considérés comme ayant une accountability particulière, ce qui nous permet d'argumenter en faveur d'une documentation par collections extensives de ces épisodes.


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